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Allocution de Sa Majesté la Reine lors de la visite à l'organisation mondiale de la Santé (OMS)

22 mai 2019

Monsieur le Directeur Général,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,

En acceptant la fonction de Défenseur des Objectifs du Développement durable des Nations Unies, j’ai décidé de faire de la santé mentale l’une de mes priorités. Je suis donc heureuse de pouvoir contribuer à la réflexion sur ce sujet crucial. 

Comme vous le savez, la promotion de la santé et du bien-être pour tous fait partie des SDG’s. Dans le cadre de l’objectif 3 sur la santé, la communauté internationale s’est aussi fixé comme perspective de promouvoir la santé et le bien-être mentaux. Sans une bonne santé mentale, ni les personnes, ni les sociétés ne sont en mesure d’atteindre leur plein potentiel. Investir dans le capital humain est une condition essentielle du développement.

Les problèmes liés à la santé mentale concernent les personnes de tout âge et de toute origine sociale, qui peuvent être affectées par des maladies d’origine génétique ou physique, mais aussi par le stress et par l’anxiété. Nous savons que les jeunes et les personnes âgées sont plus fragiles. Tous les pays - qu’ils soient développés ou en développement - sont concernés.

De plus, les événements vécus dans des situations de crise comme les conflits et les catastrophes naturelles, mais aussi le dénuement extrême et la violence au quotidien, qu’elle soit physique ou mentale, sont à l’origine de traumatismes psychologiques profonds. Pour se reconstruire et retrouver leur place, les personnes affectées, comme les enfants-soldats, ou les victimes de violences sexuelles, doivent être mieux accompagnées.    

La stigmatisation des personnes souffrant de problèmes mentaux et le tabou qui les entoure constituent, partout dans le monde, des freins considérables à leur prise en charge. Il faut poursuivre les efforts pour rompre ce silence, si nous voulons mettre en œuvre l’un des principes fondamentaux de l’Agenda 2030 :  personne ne doit être laissé pour compte.

Mais même ceux qui cherchent conseil et assistance peuvent se heurter à de nouvelles difficultés.

Trop souvent l’offre médicale et sociale de qualité manque : la santé mentale n’est pas considérée partout comme une priorité. Les moyens mis à la disposition du secteur de la santé mentale demeurent trop modestes. Dans cette perspective, la prise en compte des pathologies mentales dans le cadre de systèmes de couverture de santé universelles devrait être généralisée.  De plus le nombre de professionnels qualifiés demeure insuffisant : il est donc essentiel de susciter des vocations pour ce type de formation.  

Aujourd’hui pourtant des formes nouvelles de prise en charge se développent, pour offrir des alternatives à la médicalisation et à l’institutionnalisation. Elles font davantage intervenir les patients eux-mêmes, les familles et les communautés, mais aussi des volontaires et bien entendu des professionnels, dans une approche plus respectueuse des droits et de la dignité humaine.

J’ai eu par exemple l’occasion de constater les effets positifs de projets centrés sur la musique, auxquels prennent part des enfants et des jeunes en difficulté psycho-sociale. 

Lors de ma récente visite au Mozambique, j’ai pu visiter des services de santé dans la province de Gaza, en particulier un projet de l’OMS à l’hôpital de district de Chokwe. Au-delà du dévouement du personnel soignant, travaillant dans des conditions difficiles, j’ai été touchée par la solidarité entre familles et amis dans l’accompagnement des enfants et des adultes en difficulté.  

Même si les origines des problèmes de santé mentale sont multiples, même si les relations de cause à effet ne sont pas univoques, il faut investir davantage dans la prévention : il faut traiter aussi les causes sociales et environnementales du mal-être psychosocial, qui résulte parfois de la pauvreté et de l’anxiété qu’elle génère, de relations familiales dysfonctionnelles, de liens sociaux défaillants, de conditions de travail difficiles.

Si nous voulons accélérer la mise en œuvre de nos objectifs en matière de santé mentale, les résultats de la recherche et d’expériences concluantes doivent être partagés le plus largement possible. Les mettre à disposition dans les langues accessibles à diverses communautés de chercheurs, de soignants, d’accompagnateurs sociaux et bien entendu des personnes directement concernées permettrait d’élargir considérablement le dialogue mondial sur la santé mentale.

Comme pour tous les SDG’s, il est urgent de donner une nouvelle impulsion à la mise en œuvre de l’objectif 3 des Nations Unies en matière de santé mentale. Votre débat d’aujourd’hui ainsi que la nouvelle Initiative de l’OMS sur la santé mentale constituent à cet égard des signaux importants. Nul ne peut ignorer que les défis restent immenses, tant pour faire prendre conscience des enjeux de la santé mentale et répondre aux besoins que pour faire changer durablement les habitudes.

 

*Seul le prononcé fait foi.