Discours de Sa Majesté la Reine, Be-Philanthropy, une journée pour célébrer la philanthropie, Autoworld, Bruxelles

Mesdames, Messieurs,

L’évènement qui nous réunit aujourd’hui doit nous aider à répondre à quelques questions essentielles qui se posent en matière de philanthropie.

D’abord, nous devons nous interroger sur les raisons d’être de la philanthropie en 2023.

Si de tout temps, l’aspiration à la solidarité et au partage a fait partie de la nature humaine, le désir d’empathie a au cours des dernières années encore été renforcé par la prise de conscience de notre fragilité collective suite à la pandémie du Covid, à la guerre en Ukraine et à des catastrophes naturelles comme les inondations de l’été 2021 en Belgique ou les récents tremblements de terre en Turquie et en Syrie.

La philanthropie offre aussi cette particularité d’être un acte où toutes les parties sont gagnantes car aider autrui rend plus heureux celui qui reçoit mais aussi celui qui donne.

 La philanthropie met ses moyens financiers et son expérience de terrain au service de la communauté. Les individus, les familles, les entreprises complètent l’action d’autres instances pour construire une société inclusive, une société qui ne laisse personne au bord de la route.

Comment encourager la philanthropie me semble être une deuxième question. Est-ce par l’éducation à la générosité dès l’enfance ? Est-ce par la promotion des outils numériques modernes comme les donations en ligne ?  A cet égard, il faut aussi tenir compte du fait que la philanthropie ne se résume pas au don d’argent. La contribution d’un individu peut prendre la forme d’un don de son temps pour, par exemple, aider un élève en difficulté scolaire, pour guider un jeune entrepreneur, pour tenir compagnie à une personne âgée. De même, l’engagement sociétale d’une entreprise peut s’exprimer par un comportement social et environnemental intégré dans le processus industriel. Il est important que cette forme de philanthropie soit aussi facilitée.

Une troisième question est celle du lien entre le donateur et le projet. Faut-il un lien identifiable entre le donateur et une cause bien spécifique ou faut-il au contraire viser l’effet de volume et les économies d’échelle pour s’attaquer aux problèmes à travers de grands fonds collectifs qui rassemblent les dons individuels ? Quel est le meilleur véhicule ? La réponse à cette question dépendra de la nature de la cause et évoluera sans doute avec les technologies qui permettent une gestion de plus en plus personnalisée des dons et des projets.

Quatrièmement, comment s’assurer qu’aucune cause n’est oubliée ? Les besoins sont malheureusement grandissants car de trop nombreuses personnes en Belgique, en Europe et dans le reste du monde connaissent la précarité ou sont fragilisées par les évènements de la vie. Il faut tantôt soulager dans l’urgence les victimes de catastrophes naturelles et tantôt travailler à des problèmes de long terme comme la qualité de vie de nos séniors. L’important est de répondre au plus grand nombre de besoins possible et que chacun puisse soutenir les projets qui lui tiennent le plus à cœur.

Enfin, une fois le don réalisé, comment maximiser son impact ? Quelles garanties peut-on donner au donateur que l’argent donné sera utilisé de la meilleure des façons ? Que doivent faire les Institutions gestionnaires de la philanthropie pour garder la confiance des donateurs ? Quels sont les meilleurs instruments pour évaluer la bonne gestion des fonds reçus ? Dans un souci d’efficacité, les organisations philanthropiques se sont professionnalisées au cours des dernières décennies et elles s’efforcent d’évoluer avec la société.

Ces questions et bien d’autres se posent tant au niveau local que national, européen et mondial.

Vos discussions de cette journée devraient vous aider à y répondre et je suis heureuse en tant que Présidente d’honneur de la Fondation Roi Baudouin que celle-ci ait pris l’initiative de cette journée.

Pour terminer, je voudrais souligner que cette journée consacrée à réfléchir à la philanthropie en Belgique et en Europe est aussi l’occasion d’exprimer toute notre reconnaissance non seulement aux donateurs mais aussi aux Institutions et aux acteurs de terrain qui se consacrent jour après jour à transformer la générosité en projets concrets pour le bien d’autrui.

Je ne doute pas que vos échanges contribueront à construire une philanthropie pérenne, efficace et innovante pour répondre encore mieux aux besoins du vivre ensemble de nos sociétés.